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M'inscrireChristophe Robert, de l'ex-Fondation Abbé-Pierre : « La précarité n'est pas une fatalité »

Publié le
Le 27 novembre, le délégué général de la Fondation pour le logement des défavorisés (ex-Fondation Abbé Pierre) donne une conférence dans le cadre du cycle Presse Citron organisé par la Métropole. Entre constat sur le creusement des inégalités et pistes concrètes pour inverser la tendance, l’expert défend l’idée qu’il est possible d’agir autrement. Entretien.
4,2 millions de personnes mal logées en France, plus de 11 millions de personnes en situation de pauvreté : que vous inspirent ces chiffres ?
On n’a jamais atteint un taux de pauvreté aussi élevé en France depuis 30 ans. C’est extrêmement préoccupant. Et ce taux prend uniquement en compte les ressources des ménages, pas les dépenses, donc il ne dit pas tout. Pour tout un pan de la population, la moindre dépense imprévue vient plomber un budget déjà extrêmement tendu. Côté logement, le nombre de personnes sans domicile a doublé en 10 ans. On voit bien qu’on n’a pas su apporter les bonnes réponses. Sans oublier le creusement des inégalités entre les très pauvres et les ultra-riches. Ca aussi, ce n’est pas un bon signal pour la démocratie et la cohésion du pays.
Pourquoi cette évolution ?
Au fil des 30 dernières années, la protection que constitue l’emploi s’est fragilisée, avec le phénomène des travailleurs pauvres (ubérisation, temps partiels contraints, CDD à répétition, intérim…). Parallèlement, certaines dépenses ont augmenté. Le logement est devenu le premier poste de dépense des ménages. La protection sociale (RSA, APL, aides aux familles…) n’a pas suivi le rythme de l’évolution des dépenses de première nécessité. Les ménages en font les frais.
Comment inverser la tendance ?
Il y a beaucoup à faire. D’abord, soutenir davantage les personnes les plus en difficultés. Ça veut dire revaloriser les minimas sociaux mais aussi d’autres aides. Le chèque énergie ne représente que 150 euros par an environ ; c’est très faible face à l’augmentation du coût de l’énergie. Il existe aussi d’autres initiatives. En matière d’accès à l’eau par exemple, certaines villes expérimentent une tarification progressive : les premiers mètres cubes, qui correspondent aux besoins essentiels, sont gratuits, puis le prix augmente selon la consommation. Ce type de dispositif est plus protecteur. Il y a également des actions à mener sur la question des bas salaires et la régulation des marchés des biens essentiels. Par exemple, en matière de logement, on pousse à l’encadrement des loyers pour limiter la hausse excessive des prix dans les villes.
Donc, il existe des solutions. Vous êtes plutôt optimiste ?
Oui, c’est ce qui me rend fou. Il faut d’abord mener un débat sur ces nouvelles réalités sociales, sur les évolutions de la protection sociale ces dernières décennies mais aussi sur les idées qui marchent, car il y en a. Un débat de société aussi, parce que la question du financement est essentielle. Je suis tout à fait conscient de l’état des finances publiques et de la dette. Mais on a des propositions à faire sur le partage des richesses, en faisant contribuer chacun à sa juste mesure, tant les ménages que les entreprises. On peut vraiment faire beaucoup mieux.
Est-ce que les habitants peuvent agir à leur niveau ?
Oui, et c’est déterminant. Déjà, chacun peut se questionner sur ce qu’il attend du politique, au niveau local comme national, et exercer son pouvoir démocratique via le vote. Ensuite, être solidaire: regarder autour de soi, tendre la main, voir si quelqu’un a besoin d’être orienté vers des dispositifs d’aide sociale ou des associations… Le regard qui est porté sur l’autre, celui qui souffre, n’est pas anodin. Et puis, il y a l’engagement associatif bénévole ou le don. La Fondation fonctionne à 98 % grâce à des dons, reversés à des associations. C’est un exercice de la solidarité qui est formidable.
Une question plus personnelle : comment gardez-vous votre énergie et vos convictions intactes ?
Très sincèrement, je n’y réfléchis pas. Je n’aime pas trop parler de moi mais je suis profondément meurtri par les inégalités et par la méconnaissance de la réalité de pourquoi les gens sont dans la galère. Je ne dis pas qu’il n’y a pas des gens qui profitent du système, mais la quasi-totalité des personnes qu’on aide se battent, ont vécu des choses très difficiles en termes de santé, de rupture familiale, de perte d’emploi, et essayent avec beaucoup de dignité de s’en sortir. Voir qu’on ne les protège pas ou qu’on les montre du doigt, me touche profondément.
*INSEE 2023
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